La décennie 2000 marque un tournant déterminant dans la création des institutions de micro-financement des activités rurales dans les pays pauvres.
En 2000, la population du Togo était estimée à 5000000 habitants, mais elle serait à plus de 6000000 habitants aujourd'hui. Près de 80% de la population active travaillent dans l'agriculture et l'élevage. Ces deux activités y trouvent des conditions naturelles favorables : des sols assez fertiles et des précipitations suffisantes.
Compte tenu de l'importance du secteur agro-pastoral dans la vie des populations du Togo, l'absence d'une structure d'épargne et de crédit susceptible de financer les projets s'y avérait préoccupante. Pour combler ce déficit, l'élite urbaine et traditionnelle est créee.
Cette structure de micro-financement reçoit les appuis technique et financier de partenaires.
Les missions assignées par ses initiateurs à cette micro-banque est d'une part de démontrer les limites de la théorie économique classique qui affirme que « le pauvre est trop pauvre pour épargner et pour recevoir un crédit », d'autre part d'associer aux techniques modernes de gestion des institutions de micro-financement les valeurs socio-culturelles, pour faire bénéficier le maximum de mutualistes des services financiers.
A partir de 1990, et suite à la crise socio- politique et économique, l'Etat Togolais s'est désengagé du secteur agro-pastoral au profit de la société civile et d'autres opérateurs privés. C'est dans ce contexte «d'abandon» des masses rurales pauvres à leur propre sort que OJADEC-AFRIQUE Microfinance a vu le jour, grâce au dynamisme et à l'ingéniosité de l'élite urbaine et traditionnelle de Togolais.
Elle tire son origine d'un décret - modifié et complété - portant création des sociétés coopératives et des GIC (Groupements d'Initiatives Communes) au Togo. Elle est dotée de trois missions essentielles qui sont :
- la sensibilisation de la population grâce aux campagnes d'information sur la nécessité de se prendre en charge, à travers une mutuelle en faveur de l'union pour le bien de tous et de chacun.
- la mobilisation des ressources financières disponibles sous forme d'épargne (dépôts à vue). Elle assure la sécurisation de cette épargne. Ces fonds sont immédiatement mis à la disposition d'opérateurs en quête de financement. La sécurisation des fonds ainsi collectés est assurée en aval par le projet ,et en amont par la Société Africaine d'Assurances Bénéficial life.
Ces différentes structures offrent au Projet des garanties fiables permettant de pallier les risques inhérents aux méthodes d'épargne traditionnelles. L'ONG étant l'émanation de la volonté communautaire, d'importantes sommes d'argent, jadis hors du circuit financier semi-formel et formel, y reviennent, d'autant plus facilement que dans cette institution de micro-financement, le taux de rémunération s'élève à 2,5 %.
- Le financement des projets générateurs de revenus et de micro- entreprises. Le système financier formel met l'accent sur des garanties conventionnelles (immeubles offerts en hypothèque, titre foncier, garantie - salaire, etc.). Ce procédé est de nature à exclure les ruraux dont le patrimoine se limite souvent à des objets d'art ayant plus une valeur psychologique et culturelle que marchande. Les transactions du crédit ont un coût très élevé et à cela s'ajoute des taux d'intérêt qui oscillent entre 18 et 25 %. Ces taux sont préjudiciables aux micro-entreprises dont la rentabilité ne dépasse guère 15 % (K. P. Fokam, bibli. p. 167). A contrario, le projet tient compte des réalités socio-économiques des ruraux . C'est pourquoi elle offre des crédits à un taux d'intérêt qui s'élève à 3,5 %.
La micro-banque sera gérée par plusieurs organismes :
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une assemblée générale de 09 membres qui définit la politique générale de la mutuelle. En tant qu'organe de décision, elle fonctionne selon le respect du modèle démocratique de « one man, one vote » ;
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un comité des sages de 05 membres, dont deux représentants de l'autorité traditionnelle. Cet organe juridictionnel est placé sous la haute autorité du chef supérieur . Le comité assure entre autres l'intégration des valeurs socio-culturelles et religieuses à la gestion de cette micro-banque ;
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un conseil d'administration de 03 membres, qui assiste le secrétariat exécutif dans la gestion. Il organise les séances du comité de crédit ;
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un secrétariat exécutif composé d'un secrétaire-trésorier, titulaire d'un BTS en comptabilité, d'un comptable nanti d'un probatoire en comptabilité, et enfin d'une caissière ou « servante du peuple ». Cette dernière est titulaire d'un CAP en comptabilité. Ce trio assure au quotidien la gestion courante.
En définitive, à part le personnel du secrétariat exécutif qui est salarié, les membres des autres organes de gestion sont des bénévoles. Cette action est possible à cause d'une forte influence des élites urbaines et rurales dans les différents organes de gestion. Le rôle de l'élite dans ces circonstances est de compléter l'action des populations locales, car elle maîtrise l'expertise technique nécessaire, et dispose aussi des ressources financières et humaines adéquates au bon fonctionnement de la banque communautaire.
L'ONG OJADEC-AFRIQUE est la fondatrice et la gérante de cette micro-banque. En tant que telle, elle assure son fonctionnement en pourvoyant ses différentes structures de gestion en ressources humaines de qualité. En plus, elle prend en charge la mobilisation de l'épargne et la constitution des différents fonds (établissement, fonctionnement) . C'est ce que J. Bomda (bibl. p. 185) appelle « l'argent chaud ».
Les fond des mutuelles membres représentent environ 80 % des capacités financières du projet. Pour convaincre ses mutualistes d'adhérer à la banque de proximité, l'ONG pratique une politique sociale dans l'ouverture des comptes d'épargne. En fait, pour acquérir la qualité de mutualiste dans cette micro-banque, il faut remplir 3 conditions : verser des droits d'adhésion qui s'élèvent à 2 500 F. CFA ; effectuer un versement de 10 000 F. CFA au fonds d'établissement ; assurer un versement régulier d'au moins 1000 F. CFA par mois ; enfin signer le livre d'or.
La somme totale de 12 000 F. CFA que le mutualiste de le projet verse à l'ouverture du compte est de loin inférieure aux 50 000 F. CFA et aux 150 000 F. CFA qu'exigent respectivement la caisse d'épargne et les banques commerciales. Pour accroître le nombre de ses mutualistes, le projet a opté pour une sensibilisation « agressive » (porte à porte, lieu public) auprès des populations rurales. De même, elle a recours aux élites pour sensibiliser ces populations à ses services et produits. De par sa politique participative, cette micro-banque assiste financièrement la population dans ses activités économiques (primes aux lauréats du mini-comice agro-pastoral), culturelles (financement du tournoi de la semaine de la jeunesse), sociales (campagne de dépistage du cancer du col de l'utérus, don de 2000 tables et bancs aux lycée de la place.
Nous avons bésoins des aides des bailleirs de Fond pour l'extension de ce projet: véritable stratégie de lutte contre la pauvreté